Abnousse Shalmani : "La révolution n’est pas forcément positive"
Où auriez-vous aimé être durant la “nuit des barricades”, du 10 au 11 mai 1968 ?
Ce qui me saute aux yeux dans les photos de Mai 68, ce sont les femmes en pantalon ou en minijupe qui marchent, bras levés, en mouvement. Le pantalon fait encore débat et la minijupe n’est commercialisée que depuis 1965, l’année où les femmes obtiennent le droit à un compte bancaire… J’aurais aimé être en jupe ou en pantalon, qu’importe, mais en mouvement.
Avez-vous vécu une révolution ?
J’ai vécu la révolution que j’aurais aimé ne pas vivre, la révolution islamique en Iran, en 1979. La révolution n’est donc pas forcément positive pour moi. En arrivant à Paris, j’ai découvert les nus du Louvre. La nudité est devenue pour moi un repoussoir contre les islamistes, comme l’ail qui fait reculer les vampires.
Quel slogan révolutionnaire vous parle ?
“L’imagination au pouvoir”, un slogan que l’on retrouve aussi dans les textes libertins.
Faut-il encore croire au terme de “révolution” ?
Dans la révolution, il y a une dimension collective qui finit toujours dans le sang. Je préfère les révolutions individuelles.
Que pensez-vous des combats qui animent les femmes en ce moment ?
Prendre la parole est toujours extrêmement positif. Il faut dire la violence, le dégoût, le besoin de changement. Mais la délation est inacceptable. Le viol est un crime qui doit se régler au tribunal. Et le puritanisme est une prison pour les femmes. Dès que l’on commence à parler de leur faiblesse, de la nécessité de les protéger, ça m’angoisse. Et troisième chose : on commence à s’en prendre à l’art, mais l’art est justement là pour être subversif.
Quelle figure révolutionnaire vous inspire ?
Sade, parce qu’il est au delà de la révolution. C’est un anti-idéologue, il observe et il décrit.
Photographie par Vincent Dessailly
Coiffure et maquillage Céline Cheval, Blandine Desgraz, Louise Garnier, Christelle Minbourg