Pop Culture

Que vaut la nouvelle série avec Kate Winslet ?

Climat périurbain sinistré, secrets à foison, drames personnels tus, crimes échappants à la police, héroïne dysfonctionnelle : disons que la mini-série Mare of Easttown cochait toutes les cases du polar sans personnalité. Et pourtant, elle nous a hypnotisé.

© 2021 Home Box Office, Inc. All rights reserved. HBO®
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Quelque part dans les writers’rooms des scénaristes œuvrant à nourrir les chaînes de télévision et autres diffuseurs de programmes, on y joue sans doute à un étrange bingo, où il s’agit de cocher « ville grise », « disparitions de jeunes filles », « tout le monde a une tête de suspect », « secrets de famille », « flic fracassé-e par la vie », etc, à fin d’obtenir une série désirable. A la vue du premier épisode (nous avons pu voir les cinq premiers de cette mini-série qui en compte sept), eh bien, bingo ! Easttown, ni vraiment une ville, ni vraiment une banlieue, quelque part en Pennsylvanie, où rien ne semble jamais rien éclairer le quotidien de ses habitant-e-s, vit au rythme (lent, comme sous sédatif) d’une enquête pour retrouver le coupable d’un meurtre, sous fond de la disparition d’une jeune fille plusieurs mois plus tôt. Les deux patinent pareillement, sous la conduite de l’inspectrice Mare - on préfère ne rien dévoiler de ce qui la tourmente, la hante, mais disons que la bonne fortune semble l’avoir négligée. Evoquant la méconnue et renversante série Rectify (disponible sur MyCanal), la langueur mélancolique avec laquelle le récit se déploie, de personnage secondaire en personnage secondaire, de révélation en révélation, insérant avec délicatesse des intrigues anodines, mais si finement regardées qu’elles semblent soudain majuscules, prise de brèves et saisissantes secousses, offre une expérience singulière. Sur une partition de polar, exécutée avec beaucoup de sobriété, sans affectation superflue, Mare of Easttown semble douée d’une sensibilité devant peu au respect des codes du genre : ici nul héroïsme, nulle extra-lucidité, rien qui n’extraie les personnages de l’ordinaire. Un ordinaire maussade, où l’on circule comme l’on peut, pas nécessairement avec grâce ou bienveillance, mais qui ne cesse jamais de capter la nôtre, de bienveillance. Les enjeux narratifs centraux - la quête du coupable, le sort de la disparue - semblent des prétextes (admirablement portés à l’écran, dans une mise en scène monochrome, atone, mais passionnante) au dessin du portrait d’une femme. Mare, donc, totalement larguée par le monde qui l’entoure, et interprétée par Kate Winslet, sidérante par sa capacité à nuancer chaque émotion et à offrir des variations autour d’un personnage qu’une autre aurait (peut-être, on suppose) ancré dans un seul territoire expressif. Exceptionnelle, elle affirme - bien pudiquement, tant ses effets n’en sont pas, douée du génie pour les silences et l’effacement - qu’elle est une actrice majeure de notre époque. 

A partir du lundi 19 avril à 21h50 sur OCS. Une mini-série en sept épisodes. Créée par Brad Ingelsby. Avec Kate Winslet, Julianne Nicholson, Guy Pearce et Evan Peters

Guy Pearce et Kate Winslet. © 2021 Home Box Office, Inc. All rights reserved. HBO®
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La bande-annonce de Mare of Easttown

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