French Riviera

Sébastien Moreu : "je suis Tropézien dans l’âme"

La maison Éditions Sébastien Moreu est le nouveau quartier général culturel tropézien. Rencontre avec son fondateur.

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De l’Art à la Plage À L’ÉDITION

Artiste, curateur et désormais éditeur. Après presque 25 ans au côté du galeriste Enrico Navarra pour lequel il a dirigé la collection Made by... ou encore le livre référence sur Château La Coste, Sébastien Moreu, natif de Saint-Tropez, y a ouvert sa propre maison d’édition il y a trois ans, avec laquelle il continue de veiller sur une partie des publications de la galerie Navarra tout en développant des projets qui lui sont propres. Parmi lesquels, le dernier roman de Mian Mian, un hommage à Agnès Varda et la sculptrice Valentine Schlegel ou encore un livre autour d’Amos Gitaï avec le soutien du Collège de France. La maison Éditions Sébastien Moreu est située dans le village de Saint-Tropez, dans le fameux cabinet du dentiste des stars, devenu aujourd’hui le quartier général culturel tropézien.

L’OFFICIEL : Au milieu des années 90, Enrico Navarra a amené l’art contemporain à Saint-Tropez avec “L’Art à la plage”, montrant des sculptures monumentales d’artistes internationaux sur la plage de Ramatuelle. Parlez-nous de ce projet qui vous a réuni...

SÉBASTIEN MOREU : Lors du premier “L’Art à la plage”, en 1994, je n’avais que 22 ans, et Enrico Navarra amenait en effet l’art contemporain à Saint-Tropez et Ramatuelle. L’exposition fut essentiellement accueillie par Paul Tomaselli à la Voile Rouge, Khaled Khoudair et Jean-Marie Amoros à Nioulargo et mes frères Jean-Claude et Jean-François Moreu à la Plage des Jumeaux... Trois établissements qui ont depuis disparu. La Mairie n’ayant pas voulu de l’exposition, l’essentiel des œuvres s’est retrouvé rassemblé sur un terrain privé en retrait de la plage. Je me suis transformé en chargé de relations publiques et presse de l’exposition, distribuant généreusement les catalogues qu’Enrico mettait à ma disposition pour cette mission. À la fin de l’été nous avions eu plus de succès que l’exposition concurrente organisée par la commune “L’Art à sa place”! Face à l’étendue des retombées, Enrico m’a pris pour un génie, et m’a pris sous son aile. L’exposition est restée dans la mémoire collective et, en 2001, la Mairie de Ramatuelle m’a fait savoir qu’elle ne serait pas opposée à ce que la galerie Navarra renouvelle cette opération. Il y eut donc la seconde édition en 2001, puis en 2004 une édition franco-chinoise, en 2005 un one- man-show Keith Haring avec la galerie Jérôme de Noirmont et, en 2006, une édition consacrée à la scène contemporaine indienne. Les œuvres étaient réparties sur la plage de Pampelonne entre les plages publiques et les établissements, essentiellement la Plage des Jumeaux sur laquelle j’avais familialement plus d’influence et qui devenait le navire amiral.

 

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L’O : Vous avez commencé à éditer des livres avec la série monumentale Made by... Comment est née l’envie d’éditer ?


SM : Enrico Navarra m’a donné carte blanche pour animer la collection Made by... J’ai travaillé près de 25 ans au côté d’Enrico, et son fils Doriano, entouré de ses sœurs, a décidé de faire tout son possible pour continuer et achever les projets en cours et entamer une nouvelle ère.

L’O : Ensuite vous avez fait un magnifique ouvrage sur Château La Coste. Comment vous définiriez ce lieu mythique ?


SM : Ce livre a été un travail de longue haleine, nous avons constitué une équipe autour du journaliste critique au Monde Frédéric Edelmann. Sur une période de deux ans, Simon Schwyzer, notre photographe, est allé à chaque saison pour documenter les œuvres et les architectures, mais aussi la vigne et le travail des hommes... à toutes les heures, par tous les temps... Ce livre sur Château La Coste est une promenade délicate que le visiteur habituel ne fait pas.

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L’O : Dernièrement sorti, La Maison de Rosalie, coédité avec l’Atelier Daguerre, est un livre regroupant une sélection de photographies d’Agnès Varda et d’œuvres de la sculptrice Valentine Schlegel...


SM : C’est une chance et une belle histoire d’amitié, celle qui unissait Valentine et Agnès, et celle qui me lie à Rosalie Varda, la fille d’Agnès. La chance, c’est qu’elle m’ait proposé de faire ce magnifique petit livre qui, en plus d’être un livre sur ces deux femmes d’exception, est le témoignage de Rosalie sur cette amitié à travers l’œil de la petite fille qu’elle était.

L’O : Il y a aussi la collection Cabinet du Docteur Moreu, vouée aux objets littéraires non conventionnels comme ceux de l ’ écrivaine chinoise Mian Mian... Un clin d’œil au cabinet dentaire de votre père où vous avez installé vos bureaux...

SM : Le livre de Mian Mian est le premier que j’ai édité il y a deux ans, c’est effectivement l’inauguration de cette collection dont le nom est un hommage au cabinet dentaire de mon père, conçu par Marc Berthier en 1972 – designer dont je développe la numérisation des archives professionnelles. Mon père exerce toujours dans ce lieu soigneusement préservé, et j’envahis un peu l’un de ses cabinets.

L’O : Êtes-vous un Tropézien dans l’âme?


SM : J’aurais tendance à dire que je me sens un peu étranger à ce type de revendication, ma chanson préférée de Brassens ne dit- elle pas : “C’est vrai qu’ils sont plaisants, tous ces petits villages/Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités/Avec leurs châteaux forts, leurs églises, leurs plages/Ils n’ont qu’un seul point faible et c’est d’être habités/Et c’est d’être habités par des gens qui regardent/Le reste avec mépris du haut de leurs remparts/La race des chauvins, des porteurs de cocardes/Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part...” Mais si par Saint-Tropez on entend ce lieu qui a certainement été le premier village global, où tant de créateurs sont venus... Si par Saint-Tropez on entend ce lieu à l’identité méditerranéenne et à l’art de vivre si fort qu’il résiste avec souplesse à toutes les invasions et toutes les modes... Si par Saint-Tropez on comprend cette culture locale qui survit à la globalisation en devenant un moteur essentiel... alors oui, je suis Tropézien dans l’âme.

 

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L’exposition « Keith Haring à la Citadelle de Saint-Tropez » est prolongée jusqu’au 15 novembre 2021 au Musée d’histoire maritime de Saint-Tropez.

http://www.sebastienmoreu.com

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Sebastien Moreu photographié par Simon Schwyzer

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