Nico Vascellari : “Mon travail est d’abord né de l’ennui et de la haine“
L’OFFICIEL ART : Quelle est votre définition de la performance ?
NICO VASCELLARI : En art, la performance suppose toujours un médium particulier : le corps. Visible ou invisible, singulier ou pluriel, visuel ou auditif, ou les deux à la fois, le corps est l’élément indispensable. A mes débuts, cela dit, la performance n’était pour moi qu’un mode d’expression parmi d’autres. Après avoir abandonné mes études de cinéma, je me suis tourné vers le milieu de la culture underground et de la performance, car cette évolution me semblait cohérente, voire la seule possible pour traduire une expérience vitale et chargée de sens. J’ai ressenti une immense liberté en découvrant le travail d’artistes comme Gunther Brus ou Rudolf Schwarzkogler, par exemple, ou encore Bas Jan Ader ou Mike Kelley. J’ai commencé à visiter des musées partout en Europe, dans les villes où mon groupe donnait des concerts le soir. Mon travail est d’abord né de l’ennui et de la haine, et il a évolué vers d’autres formes d’ennui et de haine. De manière générale, je dirais que le vide et l’absence auront constitué les éléments centraux au début de ma recherche.
Comment l’installation Revenge, montrée au public pour la première et unique fois lors de Biennale de Venise 2007, est-elle réactivée dans le cadre du Maxxi ?
Revenge est une installation faite de bois calciné et de 63 enceintes ; que j’avais empruntées en 2007, pour la première présentation à la 52e Biennale de Venise, à divers groupes underground européens. A la fin de l’exposition, j’ai dû leur racheter les enceintes car beaucoup étaient très abîmées. A l’époque, l’installation était activée par une performance dont j’avais la charge avec John Wiese, qui contrôlait le feedback et les cris que je produisais en traversant le public. Au Maxxi, Revenge est installée à l’intérieur du musée, et la performance a lieu dans un espace inédit, qui n’a encore jamais été ouvert au public. C’est un parking de trois étages, dont deux sont souterrains. Pour le dire simplement, Revenge est un poème épique qui révèle une lutte intérieure visant à préserver l’authenticité, ou du moins ce qu’il en reste. Revenge traduit ce conflit-là.
Avec le recul, quel regard portez-vous aujourd’hui sur cette installation de 2007 ?
Beaucoup de choses se sont produites et beaucoup ont changé depuis cette exposition. A l’époque, l’invitation à la Biennale de Venise m’a incité à remettre mon travail en question. Ce que j’avais en tête, quand la commission m’a appelé pour m’annoncer que j’étais lauréat du Prix du jeune art italien, c’était une scène du film El Topo : le héros parvient à délivrer les monstres et à les faire sortir de leur grotte, mais, dès qu’ils atteignent le village voisin, ils se font brutalement exécuter par les villageois.
Quels échanges avez-vous eus avec la Maison Fendi dans le cadre de ce projet ?
Quand le musée m’a enfin donné son accord définitif pour l’utilisation du parking, les vraies difficultés ont commencé à surgir — comment utiliser un espace aussi énorme, et cela dans les limites imposées par les règles de sécurité ? Je suis très reconnaissant aux équipes de Fendi, qui m’ont aidé, avec autant de bienveillance que de générosité, à présenter mon travail dans ces conditions particulières. On m’a fait une confiance absolue, je crois, et cela m’a permis de poursuivre le travail en toute liberté, et en toute sincérité, pour préserver la vision et la poésie de cette pièce.
“Nico Vascellari, Revenge”, exposition jusqu’au 2 septembre au Maxxi, Via Guido Reni, 4/A, Rome, Italie.