Pop Culture

Ces artistes new-yorkais attirés par la vie à la campagne

La scène new-yorkaise a toujours eu une attirance pour la vie à la campagne. L’Officiel est parti dans le nord de l’État de New York à la rencontre d’une poignée d’artistes pour qui la nature est devenue leur chez-soi.
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Airbnb, les influenceurs et la presse spécialisée parlent de la campagne new-yorkaise comme d’une terre promise dédiée aux millennials en mal de soleil, cherchant à se déconnecter et à retrouver un bien-être qu’ils ont sans doute perdu dans la métropole. Mais ces pèlerinages de la ville à la campagne ne datent pas d’hier. Le nord de l’État de New York – une vaste région rurale qui s’étend des Finger Lakes à la très branchée Hudson Valley – a longtemps attiré et accueilli une multitude d’écrivains, de designers, d’artistes en quête de nature et de tranquillité. Certains créateurs finissent par s’y installer de façon permanente, tandis que d’autres en font leur échappatoire du week-end, permettant un épanouissement dans la nature tout en conservant une activité en ville. Pour beaucoup d’artistes, la campagne, en tant que refuge tranquille et grandiose, leur offre l’espace nécessaire pour réaliser leurs œuvres dans de bien meilleures conditions qu’en ville.

DAN COLEN, Pine Plains

En partant de la route principale, les pâturages de la Sky High Farm de Dan Colen se fondent dans l’environnement rural de Pine Plains. “Tout a commencé ici, raconte l’artiste, en passant devant un champ où paissent des vaches, des moutons et un âne nommé Joy, la première locataire à quatre pattes du fermier. Dans sa ferme – qui vient d’obtenir le statut d’association à but non lucratif –,Dan cultive des fruits et légumes bio pour en faire don à des familles dans le besoin.“Je suis ravi et enthousiaste pour l’avenir, dit-il. L’insécurité alimentaire est un véritable problème national, surtout au sein des communautés défavorisées de New York.” La notion de partage qui est au cœur de ce projet reflète également la façon dont l’artiste aborde sa pratique artistique. Il se trouve que la ferme lui sert également d’atelier : c’est là que ses peintures géantes sont soigneusement exposées.

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MIKA ROTTENBERG, Tivoli

Sa chienne Gigi ayant besoin de compagnie, Mika Rottenberg a adopté des animaux de basse-cour. Des poussins piaillent désormais dans la grange de l’artiste où se trouve un camping-car abandonné.Il s’agit de l’ancien décor de son court-métrage,“Cosmic Generator”, sorti en 2017. Mika s’arme parfois d’un bâton, car il arrive que les coqs l’intimident.Habituée depuis belle lurette aux grands espaces de Tivoli, elle s’est lentement détournée des habitudes urbaines pour s’orienter vers un style de vie plus respectueux de l’environnement. Elle travaille désormais sur la réalisation d’un nouveau film dans lequel tous les éléments présents sont recyclés.“En tant qu’artistes, mais surtout en tant qu’êtres humains, nous devons nous engager en faveur du développement durable, déclare- t-elle. Vivre à la campagne, c’est assumer régulièrement cette responsabilité.”

TSCHABALALA SELF, Hudson

Une grande partie de la carrière deTschabalala Self,artiste connue pour ses représentations de figures féminines noires, s’est déroulée à New Haven, dans le Connecticut. “On y est plus dans sa bulle qu’à Hudson”,remarque-t-elle, en descendant la colline du domaine d’Olana, ancienne propriété de l’artiste paysagiste Frederic Edwin Church. “À Hudson, vous n’êtes pas isolée des autres artistes, vous avez l’impression d’être constamment entourée.” La propriété historique est désormais un parc public et le lieu de recueillement privilégié de l’artiste, qui a acheté une maison à Hudson. Née à Harlem, Tschabalala a développé un amour de la campagne au fil du temps, favorisé par ses études au Bard College puis à la Yale School of Art. Aujourd’hui, elle a trouvé un rythme de vie idéal à Hudson, sans perdre le contact avec la métropole où les acheteurs d’art sont avides de son travail.

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DAWN KASPER, Kingston

Dawn Kasper se promène dans les bois. Rocky, son chien, la suit. Pour elle, vivre dans le nord de l’État de New York est un moyen d’intégrer une communauté très soudée. À Kingston, elle est entourée d’amis, dont la peintre Lucy Dodd avec qui elle partage une galerie d’art.À la croisée de plusieurs disciplines, Dawn pratique l’art de façon itinérante. Ainsi, s’asseoir autour d’un feu de camp avec elle s’apparente à visiter son atelier. Pour la Biennale de Venise de 2017, elle a reconstitué son œuvre la plus connue : “Nomadic Studio Practice”. Cette performance lui a permis de peindre, danser et faire de la musique pendant des mois entiers, devant des visiteurs qui se pressaient dans le pavillon principal de la Biennale. Pas étonnant qu’il lui ait fallu plusieurs années – et les bienfaits de la campagne – pour digérer cette performance très prenante sur le plan physique et mental.

TAMARA GONZALES ET CHRIS MARTIN, Catskills

En été,Chris Martin étend ses toiles géantes dehors et peint sur l’herbe. Sa partenaire, la peintre Tamara Gonzales, fait de même, mais dans son atelier au sein de la maison, tout en profitant d’une vue panoramique sur les montagnes. Les peintures de Tamara possèdent tous les charmes d’un paysage grandeur nature – on croirait presque tomber dedans si l’on regarde ses toiles de trop près. Le couple fait régulièrement des allers et retours entre New York et les Catskills, mais a passé la majeure partie des six derniers mois dans ces montagnes. La ville leur manque de temps en temps, mais ils ont pris plaisir à contempler la beauté des paysages infinis. Martin est aussi admiratif de son voisinage. “Plus vous passez de temps ici, plus vous vous rendez compte que les agriculteurs sont de véritables ingénieurs et artistes. Ils s’adaptent, et improvisent des solutions à mesure que les problèmes se présentent.”

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JASON FOX ET HUMA BHABHA, Poughkeepsie

Trois chiens se précipitent hors de la maison de Jason et Huma à Poughkeepsie. C’est là que le peintre et la sculptrice ont trouvé leur juste milieu, entre les étendues rurales de la vallée de l’Hudson et le désordre métropolitain. “Ici, je peux marcher jusqu’à la gare et aller directement en ville, explique Huma.” Le couple a acquis et transformé une vieille caserne de pompiers il y a quelques années. Chacun a dédié un étage entier à son atelier, et, ensemble, ils vivent dans le penthouse du dernier étage. Cette configuration est à l’image des fantasmes d’évasion qu’on trouve dans leurs œuvres d’art respectives. Chez Jason, cela se manifeste dans ses figures colorées, tandis que Huma l’exprime dans ses peintures et totems d’inspiration extraterrestre, dont certains ont orné le toit du Met en 2019.“Quand les gens voient notre travail, ils remarquent rarement ce que nous avons en commun, dit Jason Fox, en souriant. Pourtant nous partageons le même univers.”

MARILYN MINTER, Cold Spring

Marilyn Minter a commencé à passer du temps dans le nord de l’État de New York à la fin des années 1990 lorsque son compagnon Bill Miller lui a demandé de s’éloigner de la grande ville et de leurs emplois du temps trop chargés. Attiré par Cold Spring, le couple y a acheté un terrain verdoyant traversé par un ruisseau et y a bâti une maison. Avec l’aide de l’architecte Stan Allen, ils ont érigé un “loft” à la campagne. Ce loft a été réaménagé à plusieurs reprises pour faire place à un véritable atelier et à des chambres d’hôtes. Aujourd’hui, c’est une sublime résidence dans laquelle Marilyn s’est réfugiée pendant le confinement.À l’intérieur,les œuvres d’art réalisées par des amis artistes tels que Sue Williams, Cindy Sherman, Chris Martin et Austin Lee, pour n’en citer que quelques- uns, ornent les murs et les pièces de la maison. Pour Marilyn, dont le travail est imprégné de justice sociale, la vocation de ce lieu est de cultiver le partage et la générosité.

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