MSGM persiste et signe
Avec sa marque MSGM, dix ans cette année, l’italien Massimo Giorgetti est l’un des rares “jeunes” créateurs indépendants italiens à avoir le vent en poupe, et il est relativement à l’abri des vicissitudes du marché. Les chiffres sont là : 51 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2018, 21 % de progression par rapport à l’an- née précédente, 32 boutiques dans le monde, 43 prévues à la fin 2019, 600 points de vente multimarque, un nouveau flagship milanais de 300 m2, le lancement d’une ligne d’activewear annoncée pour février 2020 et un plan d’accé- lération à l’international... on est loin d’un bilan en demi-teinte. Fondée à l’origine avec le soutien de Manifattura Paoloni, qui produit les collections et détient toujours 49 % du capital, l’entreprise de Massimo Giorgetti (19 % des parts) a en 2018 ouvert son capital au fonds italien Style Capital à hauteur de 32 %, visant les 100 millions de chiffre d’affaires dans les quatre ans à venir. Pour quelqu’un qui, au départ, avait failli abandonner le menswear face à un marché alors plutôt sartorial, et avant que la bascule ne se fasse positivement en 2013, le parcours fait figure d’exemple. Et l’ascension est d’autant plus remarquable que le créateur, et chef d’entreprise par la force des choses, a tenu seul pendant neuf ans les rênes de l’affaire, de la création au développement de la marque, toujours au contact des fournis- seurs, des distributeurs, aux quatre coins de la planète. Aujourd’hui recentré sur la création, celui qui a grandi dans le sérail mode près de Rimini, une ville où ses parents possédaient un atelier de broderies et son oncle, un labo- ratoire textile, met plus que jamais son amour du sportswear casual au centre de ses créa- tions. C’est d’ailleurs ce qui saute aux yeux dans la collection anniversaire présentée au dernier salon Pitti Uomo, dont il était l’invité
spécial, célébrant le style qui a fait le succès de sa marque : jeune, frais, positif, énergique. Avec une identité très simplement mais préci- sément définie, proche de l’esprit streetwear. Et ce, bien avant que les tendances actuelles ne lui donnent raison. Une empreinte souve- nir de l’ADN de la marque, comme dit l’inté- ressé, mais aussi une carte pour l’avenir, qu’il décrypte pour nous en exclusivité.
L’Officiel Hommes: Dix ans, c’est déjà beau- coup, mais c’est aussi relativement jeune pour une marque aussi bien établie. Comment expli- quez-vous cette maturité ?
Massimo Giorgetti: Si je regarde en arrière, je confirme que la route fut longue, mais pas si éprouvante que cela. L’enthousiasme et l’énergie des premiers temps sont toujours là. La marque a grandi de façon saine et solide, consolidée en grande partie grâce à mes business-partners et au fonds d’investissement Style Capital, qui nous a rejoint il y a un an. Nous travaillons sur de nombreux nouveaux projets, et chacun d’entre eux est un défi très excitant. Je suis très confiant pour les dix prochaines années.
Aviez-vous dès le départ prévu de vous adresser aux nouvelles générations ?
Absolument. La jeunesse a toujours été une source d’inspiration première. Elle est affranchie des schémas pré-établis, douée d’un champ de vision à 360°, curieuse de nouvelles expériences. Quand j’ai lancé MSGM en 2009, presque personne en Italie n’en avait saisi tout le potentiel. Les logos, les matières dites faciles comme le jersey, la polaire ou le denim ne faisaient pas partie des standards formels établis par la tendance minimalisme rigoriste des années 1990, qui selon moi ne correspondaient plus aux attentes de la jeune clientèle à laquelle je souhaitais m’adresser. Je me souviens encore des réactions interloquées à la présentation de ma première collection, pour laquelle j’avais fait intervenir un jeune artiste milanais qui custo- misait en live mes créations.
Quelle est la meilleure façon de parler aux jeunes ?
Être en contact permanent avec mon public. Celui de mon équipe, dont l’âge moyen est de 26 ans, celui de la rue, mais aussi les réseaux sociaux, qui, pour le meilleur et pour le pire, sont une source d’inspiration inextinguible.
Faites-vous partie de ceux qui pensent que, pour parler aux millennials, il faut investir stratégiquement, autant sur le produit que sur la communication et le marketing?
Oui. Je suis persuadé que l’on ne peut plus aujourd’hui penser l’un sans l’autre. Création et promotion d’une collection partent d’une seule et même idée globale, d’une même vision personnelle et d’une même identité de marque. La créativité d’une maison passe aussi bien par ses produits que par son message, ses packa- gings, ses boutiques. Tous sont aussi importants les uns que les autres.
De quoi sera faite la prochaine décennie MSGM ? Voulez-vous grandir avec la commu- nauté Alpha ?
C’est l’idée pour la conquérir. Encore faut-il ne pas laisser ses aînés sur le bord de la route. N’oublions pas qu’ils ont été là dès le début et qu’ils sont restés fidèles à la marque. C’est un signe qui ne trompe pas, et qui tend à prou- ver que, jusque-là, nous avons bien fait notre travail.