Qui es-tu, Oklou ?
“Plus que la mode, ce qui m’intéresse c’est surtout le style”, explique-t-elle. Et du style, Oklou (Marylou Mayniel, de son vrai nom) en a incontestablement. Celle qui a vécu à Poitiers puis à Tours nous parle depuis Londres, où elle s’est exilée depuis quelque temps. “J’ai grandi dans une petite ville, loin de Paris, où on ne voyait pas toute cette diversité, tous ces gens différents qu’on peut croiser dans des capitales. S’exprimer à travers ses vêtements, c’est pour moi ni plus ni moins qu’une forme d’expression artistique. Commencer à surfer sur internet m’a ouvert à une immense liberté.” Depuis son enfance en province, elle s’est attelée à rattraper le temps perdu, et le tumulte de la vie londonienne lui va à ravir.
En 2018, Oklou dévoile son tout premier EP, The Rite of May, qui la propulse instantanément parmi les meilleurs espoirs de la scène électro underground. Sur ces six morceaux, on découvre une personnalité mouvante, capable de triturer ses machines avec minutie, mais aussi de provoquer une émotion directe, intense, avec une simple mélodie aérienne. “Je crois que j’ai toujours eu de la musique en moi, même avant de pouvoir en avoir des souvenirs, explique-t-elle. À la maison, j’étais entourée d’instruments et je devais avoir 3 ou 4 ans quand j’ai commencé à aller à la chorale – et, pour être honnête, je n’aimais pas trop cette contrainte d’être obligée à y aller. Dans un premier temps, ma relation à la musique, ça a d’abord été de prendre des cours pour apprendre la théorie et la pratique. J’ai aussi fait de la danse et du dessin. Tout a été complètement chamboulé quand j’ai eu mon premier ordinateur : ça a changé mon rapport à l’art, à l’image, à la vidéo, au dessin, ça a modifié mes inspirations, mes influences, ma façon de m’exprimer. J’ai commencé à m’amuser, enfin, avec un logiciel. Tout est parti de là.” Elle avait 19 ans et c’est à ce moment précis, grâce à cet objet précieux, qu’a pris forme son obsession pour la musique.
Photographie par : Ellius Grace
Stylisme par : Alizée Henot
Quelques années plus tard, la chanteuse-musicienne est devenue une productrice, une compositrice et une passionnée d’expérimentations sonores, en autodidacte. Elle passe par différents groupes avant de se lancer à corps perdu dans les musiques digitales, mais d’après elle sa façon de composer reste la même. “Je ne me sens pas comme une grande technicienne. Je sais maîtriser les basiques et j’ai mes petits trucs que j’aime bien faire, mais je ne suis pas du tout une virtuose des logiciels. Je me suis vite rendu compte que ça ne m’intéressait pas plus que ça. Ce que je compose, c’est ce que j’ai à l’intérieur de moi et ça reste une constante – ce sont mes inspirations et mon discours qui évoluent au fil des années, comme tout le monde.”
L’automne dernier, Oklou a sorti une collaboration avec la rappeuse et modèle américain Chynna (issue du collectif A$AP Mob) sur un morceau intitulé Xternal Locus. Mais ses sources d’inspiration ne lui viennent pas uniquement de la musique. Elle nous cite par exemple le compte instagram @cryingdoves691, “avec ses vêtements dans les tons blanc/crème, des tissus en lambeaux ou en dentelle, avec un côté très romantique. Côté marques, j’aime bien le look royal de Gucci”.
La musicienne n’a pas peur de prendre son temps pour concrétiser ce qui lui trotte dans la tête. Elle nous avoue qu’elle n’a pas de sortie prévue dans l’immédiat. On lui demande sur quoi elle travaille ces jours-ci : “En ce moment, je suis en studio et je m’efforce de nir les morceaux que j’ai commencés depuis longtemps, ce qui est le chose la plus difficile pour moi”, dit-elle dans un éclat de rire. L’EP The Rite of May contenait des chansons intitulées Friendless (“Sans ami”, en français) ou They Can’t Hear Me (“Ils ne peuvent pas m’entendre”) : un an plus tard, Oklou est déjà loin de tout ça, avec derrière elle des ribambelles d’admirateurs qui ne demandent qu’à écouter ses prochaines créations.