Pantagruel : le nouveau restau le plus costaud ?
Placer un restaurant sous le signe de l’ogre Rabelaisien présente l’avantage d’annoncer la couleur - ici, la voracité est bienvenue et le plaisir innocent - et l’inconvénient de ne pas tenir la promesse de prouesses gastronomiques. Jason Gouzy, passé par l’école Ferrandi, les cuisines d’Eric Frechon au Bristol, ou plus récemment du Galopin, en ouvrant ici son premier restaurant démontre une belle audace, en déclinant le même ingrédient en trois assiettes, trois temps, moins par par goût de l’épate que par intelligence du produit, de sa profondeur, souvent effleurée ailleurs, ici explorée, mise en lumière.
La Saint-Jacques entame la valse en carpaccio/citron caviar et kale brûlé, enchaîne en royale et purée de chou citronnée, et enfin, quitte la danse dans une magnifique coquille lutée, admirablement cuite. Sensible, l’approche joue sur la nacre, l’iodé, cette mâche unique, en offrant l’éclairage de l’amertume, du piquant, du beurré, en évitant la redondance du ton sur ton. En face, même tact pour réimaginer l'oursin en tonalités et variations chromatiques subtiles et un canard en mode retour de chasse admirablement honoré.
Le panache de cette séquence fait oublier la (très) légère sur-cuisson du céleri en croûte de sel et truffe inaugural. En baisser de rideau, le chocolat connaît lui aussi les joies du ternaire (chou, crème et ganache), simplifie le propos, avec pertinence, dans une note finale un rien bourgeoise, assumant une gourmandise tonique - travaillant le cacao comme Soulages travaille sur le noir, avec vigueur et nuances brossées. Pantagruel a bien écouté son père, Gargantua : "Le grand Dieu fit les planètes et nous faisons les plats nets."
24 rue du Sentier 75002 Paris
01 73 74 77 28
www.restaurant-pantagruel.com