Parfum : l'infusion Rhubarbe de Prada
À l’occasion du lancement de la dernière infusion Rhubarbe de Prada, L'OFFICIEL en a profité pour rencontrer le nez Daniela Andrier de la maison Givaudan qui l’a imaginée.
L'OFFICIEL : Parlez-nous des infusions de Prada, elles qui réunissent le présent, le passé, le futur avec savoir-faire et technologie
Daniela Andrier : Les parfums font appel à notre imaginaire. C’est cela la magie du parfum, ça doit être cela, ça ne doit et ne pas être une volonté du marché. Le parfum doit nous permettre d'accéder à nos émotions. Et c’est ce que font les infusions, elles suggèrent une apparente simplicité et une grande naturalité.
L'O : Parlez-nous de l’Infusion Rhubarbe de Prada.
D.A : Elle a un caractère très estival, on a envie de la goutter avec son côté très acidulé. L’essence de rhubarbe n’existe pas, je l’ai donc recréé avec au cœur, le Gardénol. La synesthésie joue également un rôle important, en conférant à cette infusion une couleur mais sous forme d’illusion. Les infusions se travaillent comme une aquarelle, c’est-à-dire avec un jeu de superposition très subtile qui donne une illusion de matière à la façon de petits coups de pinceau qui font que la couleur de l'un révèle la couleur de l'autre. Dans tous les parfums normalement, on met a priori les choses ensemble pour que l'ensemble fasse un joli ensemble. Mais ici, il n’est pas question de joli ensemble, c'est par l’illusion qu’on raconte quelque chose d'un ingrédient. On donne l'idée d'un personnage, en l'occurrence ici de la rhubarbe.
L’O : Les infusions, sont la rêverie incarnée ?
D.A : Il y a des parfums qui nous permettent, d'être tout le temps, dans une rêverie ininterrompue. Et je pense que les infusions, par leur apparente simplicité nous offre cette possibilité. C’est magique.
L’O : Les infusions sont propres à chacun ?
D.A : Chaque personne en fait sienne. D’une personne à l’autre, elles ne sentent jamais la même chose. Chaque infusion a des accords très facettés qui permettent à chacun de se les approprier.
L’O : Cette collection des infusions donne l'impression d’être en contrepoint de l'obsession de performance dans laquelle se trouve la parfumerie. On a l'impression que c'est quand même un petit territoire de résistance.
D.A : Je suis vraiment d'accord avec cela. Et je pense de façon très engagée qu'il y a un devoir pour toute l'industrie, de comprendre à quel point nous sommes, d’une certaine façon, un lieu de résistance d'un monde qui devient très virtuel et d'un monde qui coupe les gens de leur ressenti. Et le parfum peut permettre de renouer avec la nature, avec notre propre nature, avec nos rêves… Le parfum a un pouvoir extraordinaire, si on le maltraite, on perdra ce pouvoir-là.
L’O : C’est une jolie histoire d’être le maître parfumeur d’une collection dans son intégralité.
D.A : Imaginer les infusions de Prada me tient vraiment à cœur. J’ai l'impression qu'il n'y a absolument aucune limite dans la création.
L’O : Avez-vous d’autres infusions en préparation ?
D.A : Plus d’une dizaine dans les cartons.