Linda McCartney, parcours d'une américaine fascinante
Derrière son objectif, Linda Eastman s’est construit une solide réputation de photographe dans les années 1960. D’abord assistante pour un magazine, cette ex-étudiante en art observe attentivement le savoir faire de son petit ami de l’époque, le photographe David Dalton. Bientôt, l’élève surpasse le maître. L’Américaine décroche ses premières commandes et parvient à diriger avec tact les rock stars les plus ingérables, signe d’une intelligence rare. Après un mariage rapidement suivi d’un divorce, Linda élève seule sa fille Heather. Quand sa carrière professionnelle décolle, elle se spécialise dans les portraits de musiciens – Bob Dylan, Jimi Hendrix, Aretha Franklin, Janis Joplin, The Who ou encore les Doors ont posé pour elle.
En mai 1967, en mission à Londres, elle fait la rencontre de Paul McCartney dans un pub de Soho, à un concert de Georgie Fame. Ils se recroisent quelques jours plus tard chez Brian Epstein (le manager des Beatles), lors de la soirée de lancement de l’album Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band. Le coup de foudre se confirme. Ils se marient en 1969 et trois enfants naîtront de cette passion éternelle, notamment la future créatrice de mode Stella McCartney.
Dans leur ferme écossaise, loin de tout, le couple vit au plus près de la nature en toute liberté – un cadre idyllique pour se remettre de la séparation des Beatles. Linda et Paul commencent alors à faire de la musique ensemble, avec une tendresse qui illumine leur musique et les clichés que Linda prend à cette période. Elle chante sur le premier album solo de Paul, pour lequel l’ex-Beatles a composé plusieurs chansons en hommage à son âme soeur, The Lovely Linda et Maybe I’m Amazed. Ce n’est pas la première fois que Linda inspire des musiciens. Dès l’âge de 4 ans, elle était l’objet d’un morceau qui portait son prénom, composé par le songwriter américain Jack Lawrence. Celui-ci était l’un des clients du père de Linda, avocat spécialisé dans le domaine artistique qui représentait également les peintres Mark Rothko et Willem de Kooning, et le musicien Tommy Dorsey.
La complicité fusionnelle de Paul et Linda débouche sur des projets de plus grande ampleur : ils sortent en 1971 l’album Ram, élaboré à quatre mains, puis ils forment Wings. Ce groupe sera une incroyable aventure pour le couple : des tournées mondiales, des albums et des succès en cascade dont le tube Live and Let Die, imaginé pour la bande originale du James Bond Оponyme en 1973, ou les albums Wild Life et Band On the Run.
Le diagnostic tombe en 1996 : Linda est atteinte d’un cancer du sein. Elle décède prématurément en 1998, à l’âge de 56 ans. La compilation Wide Prairie sort peu de temps après, célébrant la carrière musicale de cette artiste libre et pétillante. Cet album est ressorti cet été, après une remastérisation à Abbey Road sous la supervision de Paul. On peut également se rendre à Glasgow pour la rétrospective Linda McCartney. Organisée par Paul et deux de leurs enfants, Stella et Mary, cette exposition présente ses photos, ses publications et une partie du matériel dont elle se servait.
Les combats de Linda se poursuivent aujourd’hui, en particulier son militantisme pour l’écologie et la défense des droits des animaux. Végétarienne convaincue depuis les seventies, bien avant la déferlante végan du XXIe siècle, Linda McCartney avait créé sa marque de produits surgelés végétariens et publié plusieurs livres de recettes pour promouvoir une nourriture saine et respectueuse de la nature. Cette “vaste prairie” accueillante nous tend les bras.
“Wide Prairie” (MPL/Capitol/uME). Exposition de photos “The Linda McCartney Retrospective”, jusqu’au 12 janvier à Glasgow (Kelvingrove Art Gallery and Museum).