Avalon 9000 : "Avant de devenir DJ, j'étais ingénieure."
Aviez-vous déjà joué ici, au Rex Club ?
Non, c'était la première fois ce soir. En revanche, je connaissais déjà Jennifer Cardini, l'autre DJ invitée, pour avoir mixé avec elle au Panorama Bar, à Berlin.
Connaissez-vous bien Paris ?
Assez mal. J'ai beaucoup voyagé en Europe, je vis à Berlin depuis trois ans, mais je ne suis venue que deux fois à Paris. J'ai mixé une fois à la Concrete, en janvier dernier, avec ma petite amie, Courtesy.
Où avez-vous grandi ?
Je suis née à San Francisco, puis ma famille a déménagé en Arizona. J'ai passé toute mon enfance là-bas, puis j'ai rejoint San Francisco, où j'ai vécu sept ans avant de m'envoler pour Berlin.
Pourquoi avoir quitté les USA ?
Avant de devenir DJ à plein temps, j'étais ingénieure. Un jour, j'ai réalisé que mon job et l'environnement ultracapitaliste de l'édition de logiciels me dérangeaient. Aujourd’hui, je m'intéresse toujours au codage, aux avancées dans la tech, mais seulement pour le plaisir. Berlin, c'est comme un nouveau chapitre de ma vie.
Où vivez-vous, à Berlin ?
Dans le quartier de Neukölnn. J'adore cette ville car tout bouge. Quand j'ai décidé d'emménager à Berlin, beaucoup d'autres amis avaient déjà quitté San Francisco pour Los Angeles ou New York... C'était une bonne idée d'aller voir ailleurs.
Vous composez chez vous ?
Je viens d'emménager dans un nouvel appartement, où j'ai pu installer un studio, au dernier étage, comme une bulle sur un toit : c'est parfait pour le son.
Combien d'heures de musique par jour ?
Honnêtement, ces derniers mois, j'ai eu du mal à plancher sur de nouveaux sons. Je tournais trop. Pendant les temps morts, je dormais ! Ma vie a beaucoup changé, j'ai dû m'habituer à partir sur la route, j'étais très amoureuse aussi. Le mois dernier, je n'ai pas tourné pendant quinze jours pour passer du temps en studio. Je travaille en rafales.
Votre journée idéale ?
Me lever tôt, m'enfermer dans mon studio, composer, et dîner entre amis.
Vous aimez donc la solitude ?
La musique électronique est un truc de solitaire. On peut s'autosuffire. En même temps, la scène est une expérience émotionnelle. J'aime que mes amis m'écoutent, et j'aime les écouter en retour.
Mixer est-il la meilleure façon de passer la nuit ?
Franchement : non ! (rires) Le Djing est ma passion, mais j'aime prendre du temps pour moi à la maison, lire un bouquin de non-fiction, ou préparer quelque chose à manger.
Revenons à la musique. Quelles sont vos influences ?
Tout ce que je compose est très personnel. Je m'inspire d'évènements de ma vie, des relations avec les autres, de paysages aussi - le désert d'Arizona est l'une des plus belles choses sur terre... Mes mix sont autobiographiques.
Quel est le lien entre une musique et un paysage ?
Le contraste. Le sable, le ciel, les monolithes et tout ce qui grouille en silence : les scorpions, araignées, serpents, leur poison... On retrouve ces dissonances dans la musique.
Avez-vous des héros dans l’électro ?
L'un de mes meilleurs souvenirs est d'avoir écouté DJ Harvey à Los Angeles. J'aime aussi François K, Danny Krivit et Joe Claussell. Ils ont déjà mixé ensemble, c'était incroyable.
Etes-vous sensible à la mode ?
Je n'ai jamais prêté beaucoup d'attention à mon style : à l'école, j'étais plutôt une computer nerd !
Faut-il être geek pour être DJ ?
J'ai toujours été une vraie geek, donc je n'envisage pas les choses autrement.
Un mot pour définir la nouvelle vague électro ?
L’éclectisme.
Stylisme : Damèse Savidan. Photos : Jean-Vincent Simonet.
Article initialement publié dans Jalouse n°202