Découvrant dans la communauté Moncler Genius une véritable famille créative, l’Irlandaise Simone Rocha a fait évoluer son style dans la forme et dans le fond.

Trois ans après la première édition de Moncler Genius, comment vous positionnez-vous dans ce &ldquo;hub&rdquo;, vous qui êtes là depuis les débuts? 
Simone Rocha : Chacun des membres a sa propre identité. À nous d&rsquo;entrer&nbsp;en conversation avec le savoir-faire et l&rsquo;histoire de la maison Moncler. Ce qui m&rsquo;a toujours intéressée dans cette initiative, c&rsquo;est précisément qu&rsquo;elle s&rsquo;apparente à un collectif. Le hub génère une sorte d&rsquo;émulation chorale.Je connaissais très bien Craig Green avant le projet, mais j&rsquo;ai pu rencontrer d&rsquo;autres designers grâce à Moncler Genius. Pierpaolo Piccioli (Valentino) notamment. Quel plaisir, quelle joie...

Un bon exemple du &ldquo;génie&rdquo; tel que Moncler l&rsquo;envisage? 
Pour moi, le fondement du génie est&nbsp;la confiance. Tout se joue à ce niveau-là: avoir confiance dans son propre travail, ses capacités, et le faire bien. C&rsquo;est beaucoup plus important que d&rsquo;être super intelligent ou super &ldquo;hype&rdquo;...&nbsp;Il y a&nbsp;quelques personnalités que j&rsquo;admire vraiment pour ça. L&rsquo;artiste Louise Bourgeois, Rei Kawakubo de Comme des&nbsp;Garçons, des gens comme mes parents. Louise Bourgeois est d&rsquo;ailleurs l&rsquo;inspiration de votre collection hiver.&nbsp;Depuis des années, ma mode a toujours été plus ou moins inspirée de son &oelig;uvre. Pour l&rsquo;hiver, je réfléchissais à une&nbsp;collection autour du concept de &ldquo;regard féminin&rdquo;... Je me rappelle avoir découvert un champ de son travail, les tapisseries qu&rsquo;elle avait tissées à partir de ses propres vêtements. Ça m&rsquo;est apparu comme le dévouement ultime d&rsquo;un artiste à son &oelig;uvre. Après en avoir parlé aux membres du studio Louise Bourgeois, j&rsquo;ai pu travailler à leurs côtés sur cinq ouvrages d&rsquo;art, que nous avons ensuite déclinés sous forme d&rsquo;imprimés ou de broderies.

Si l&rsquo;&oelig;uvre de Louise Bourgeois est&nbsp;une inspiration &ldquo;concrète&rdquo;, d&rsquo;autres de vos collections partent d&rsquo;un sentiment, d&rsquo;un souvenir... 
Tout à fait. J&rsquo;ai créé douze collections. Elles font toujours volte-face. Celle-ci &nbsp;s&rsquo;appuie sur une idée très&nbsp;spécifique;&nbsp;la&nbsp;précédente s&rsquo;apparentait davantage&nbsp;à quelque chose d&rsquo;organique... Dans ma tête, à ce moment-là,&nbsp;tout se passait à Hong Kong, d&rsquo;où ma famille est originaire. J&rsquo;ai voulu parler de ma grand- mère, de mes tantes.&nbsp;Cette collection reposait sur des sentiments personnels. C&rsquo;est naturellement différent de parler d&rsquo;un artiste.

Vous retournez parfois à Hong Kong? 
Une ou deux fois par an. Mon père vient de là-bas et j&rsquo;ai encore sept tantes et oncles sur place.&nbsp;J&rsquo;ai lu qu&rsquo;il était&nbsp;important pour vous de travailler en famille...&nbsp;Je travaille avec ma mère. Elle s&rsquo;implique modérément dans mon&nbsp;business. Mon père, lui, est un ancien créateur de mode. Tous les deux ont une solide connaissance du métier.&nbsp;Aussi,&nbsp;je considère mon équipe, qui n&rsquo;a pas changé depuis mes débuts, comme une famille. Oui, ça ressemble&nbsp;fort à une communauté !

Avec de tels parents, votre avenir était-il tout tracé ? 
Oui et non. J&rsquo;ai toujours voulu être créative. Enfant, je préférais travailler avec mes mains, j&rsquo;avais l&rsquo;esprit pratique. Comme je l&rsquo;ai dit, ma famille tenait sa propre maison de mode : j&rsquo;ai donc passé des heures dans le studio de création, une sorte d&rsquo;habitat naturel pour moi. &nbsp;Pourtant, je n&rsquo;ai pas tout de suite songé&nbsp;à en faire mon métier.&nbsp;Enfant,&nbsp;adolescente, j&rsquo;étais plutôt obsédée&nbsp;par l&rsquo;idée d&rsquo;étudier les beaux-arts. C&rsquo;est en suivant mon cursus&nbsp;au&nbsp;National College of Art and Design à Dublin&nbsp;que j&rsquo;ai trouvé la manière dont je pourrais traduire,&nbsp;physiquement, mes émotions, mes sentiments : en faisant des vêtements.

Revenons à Moncler Genius, cette collaboration vous a permis de vous ouvrir à l&rsquo;outerwear. Est-ce un genre qui a fait évoluer votre style?

L&rsquo;expertise dans le vêtement d&rsquo;extérieur, tout ce savoir-faire autour&nbsp;du duvet, voilà précisément ce qui m&rsquo;intéressait chez&nbsp;Moncler. Pour moi&nbsp;qui ai toujours travaillé avec des matières naturelles, organiques, comme le coton,&nbsp;le lin, créer à&nbsp;partir de matières high-tech a changé la donne. Par exemple, depuis mes débuts, je travaille le tailoring comme&nbsp;quelque chose de très structuré. Des trench-coats, des manteaux masculins à double boutonnière, etc. Là où&nbsp;un pardessus Moncler est complètement libéré. Mon travail avait besoin de cette fluidité.

De quoi vos vêtements protègent-ils? 
La protection renvoie à la force. Et avoir en soi une part de féminité n&rsquo;est pas synonyme de fragilité. L&rsquo;une de mes professeures à la Central Saint Martins, Louise Wilson, m&rsquo;a transmis ce message&nbsp;que j&rsquo;ai toujours voulu développer pour ma propre maison comme pour Moncler Genius. Ce n&rsquo;est pas un hasard si&nbsp;mes collections ont toujours été riches&nbsp;en volumes. Explorer cette idée&nbsp;de protection contre les éléments, d&rsquo;adaptation à l&rsquo;environnement extérieur, et la&nbsp;déplacer dans l&rsquo;imaginaire Simone Rocha m&rsquo;a permis d&rsquo;aller plus loin dans mon idée de couche protectrice. Et&nbsp;d&rsquo;engager le débat sur féminité et force.

Riches d&rsquo;expérimentations,&nbsp;vos collections restent cependant connectées à la réalité... 
Je cherche toujours à ancrer mon travail dans la réalité d&rsquo;aujourd&rsquo;hui. Je n&rsquo;ai jamais voulu que mes vêtements soient&nbsp;élitistes, qu&rsquo;ils parlent à un type social, ou à un type morphologique en particulier. N&rsquo;importe qui doit pouvoir&nbsp;entrer dans mon histoire et s&rsquo;y sentir le bienvenu.&nbsp;Par le vêtement, mais aussi par&nbsp;des éléments rendus publics : certains ouvrages d&rsquo;art qui ont inspiré mes collections, des imprimés créés avec le studio Louise Bourgeois ou la&nbsp;plasticienne Jackie Nickerson. C&rsquo;est peut-être parce que j&rsquo;ai grandi en Irlande, où tout&nbsp;le monde est comme &ldquo;né&rdquo;&nbsp;ensemble.&nbsp;Vous savez, l&rsquo;Irlande, c&rsquo;est trop petit pour être discriminant.

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Simone Rocha : "Je cherche toujours à ancrer mon travail dans la réalité"

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