Écrivaine et scénariste à l'élégance rare, elle rend hommage à la parisienne dans sa série Paris etc. et son dernier roman Gabriële. Rencontre avec une héritière de Sagan et Beauvoir. 

Elle fume clope sur clope, porte des talons hauts pour emmener son fils &agrave; l&rsquo;&eacute;cole, hurle sur les v&eacute;los parce que &ldquo;Paris, c&rsquo;est pour les bagnoles&rdquo;, ne vit pas dans le m&ecirc;me appartement que son mari, s&rsquo;enorgueillit&nbsp;de ses d&eacute;fauts et fait de chaque instant de sa vie un roman. Telle est&nbsp;la Parisienne. Ou tout du moins celle imagin&eacute;e par Anne Berest dans la s&eacute;rie Paris, etc., &eacute;crite avec Ma&iuml;wenn et Zabou Breitman pour Canal +, et incarn&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;cran par Valeria Bruni-Tedeschi.&nbsp;&ldquo;Alors cette Parisienne, elle existe ou c&rsquo;est un simple mythe pour vendre des parfums et des carr&eacute;s Herm&egrave;s aux &eacute;trangers?&rdquo;, je lui demande dans un caf&eacute; de Saint-Germain-des-Pr&eacute;s par un samedi apr&egrave;s-midi ensoleill&eacute; de mars. Sourire d&rsquo;Anne. Elle a une beaut&eacute; d&rsquo;un autre si&egrave;cle, des os qui ont l&rsquo;air fragile comme du cristal, parle si bas qu&rsquo;il y a quelque chose d&rsquo;hypnotique &agrave; l&rsquo;&eacute;couter. &ldquo;&Eacute;videmment il y a une part de clich&eacute; dans la Parisienne mais le clich&eacute;, si on l&rsquo;associe &agrave; la photographie, c&rsquo;est aussi une image qui demeure dans le temps. Cette Parisienne coquette, hautaine, s&ucirc;re d&rsquo;elle, mais pleine&nbsp;de charme et d&rsquo;humour a toujours exist&eacute; et continuera d&rsquo;exister&nbsp;apr&egrave;s nous.&rdquo;

La preuve que ce mythe continue de parler aux gens : le succ&egrave;s de How to be a Parisian in the World, livre qu&rsquo;elle a cosign&eacute; avec ses amies Caroline de Maigret, Sophie Mas et Audrey Diwan. Un succ&egrave;s qui l&rsquo;a surprise. &ldquo;Ce qui revenait beaucoup chez nos lectrices, qu&rsquo;elles viennent du Br&eacute;sil ou de Chine, c&rsquo;est cette id&eacute;e de libert&eacute; que&nbsp;la Parisienne incarne. Le fait qu&rsquo;elle se foute de tout, qu&rsquo;elle s&rsquo;assume telle qu&rsquo;elle est, avec ses d&eacute;fauts et ses fragilit&eacute;s. Et cette id&eacute;e&nbsp;de libert&eacute;, ce n&rsquo;est pas seulement la Parisienne, c&rsquo;est la Fran&ccedil;aise&nbsp;en g&eacute;n&eacute;ral. Il y a toujours eu des femmes fortes&nbsp;dans notre Histoire.&rdquo; On pourrait citer les Pr&eacute;cieuses de Madame de Scud&eacute;ry, Olympe de Gouges ou les deux Simone &ndash; de Beauvoir et Veil &ndash; mais s&rsquo;il y a&nbsp;une figure qui a marqu&eacute; la jeune &eacute;crivaine, c&rsquo;est bien celle de Fran&ccedil;oise Sagan &agrave; qui elle a consacr&eacute; un magnifique r&eacute;cit, Sagan 54, o&ugrave; elle&nbsp;raconte le coup de tonnerre que fut la publication &agrave; 17 ans de son premier roman, Bonjour Tristesse. &ldquo;Elle m&rsquo;a appris qu&rsquo;il faut s&rsquo;autoriser &agrave; &ecirc;tre la personne que l&rsquo;on est pour &ecirc;tre l&rsquo;&eacute;crivain qu&rsquo;on veut &ecirc;tre&rdquo;, explique-t-elle. Anne Berest ne conduit peut-&ecirc;tre pas des Jaguar pieds nus ni ne d&eacute;pense tous ses droits d&rsquo;auteur au casino comme son illustre a&icirc;n&eacute;e, mais elle a retenu d&rsquo;elle l&rsquo;essentiel : l&rsquo;ind&eacute;pendance d&rsquo;esprit. Cette ind&eacute;pendance que d&eacute;fendait d&eacute;j&agrave; jalousement il y a un si&egrave;cle de cela son arri&egrave;re-grand-m&egrave;re, Gabri&euml;le Buffet, &eacute;pouse et muse de Picabia, et f&eacute;ministe avant l&rsquo;heure. Dans son dernier livre, &eacute;crit avec sa s&oelig;ur cette fois-ci, elle en raconte la vie haute en couleur au milieu de cette boh&egrave;me parisienne d&rsquo;avant la Grande Guerre o&ugrave; l&rsquo;on croisait &agrave; Montmartre ou Montparnasse Picasso, Duchamp, Apollinaire, Debussy, Cocteau et tant d&rsquo;autres. Ne regrette-t-elle pas ce Paris-l&agrave; d&rsquo;ailleurs? &ldquo;On a peut-&ecirc;tre l&rsquo;impression de vivre des vies moins intenses mais qui sait ce qu&rsquo;on &eacute;crira sur notre &eacute;poque dans trente ans, r&eacute;pond-elle. Et puis la plupart des lieux sont encore l&agrave;. C&rsquo;est ce que j&rsquo;aime dans Paris, cette permanence des choses.&rdquo;&nbsp;

Anne, elle, est plut&ocirc;t Saint-Germain-des-Pr&eacute;s, o&ugrave; elle vit seule avec&nbsp;ses deux enfants. Chaque jour, apr&egrave;s les avoir d&eacute;pos&eacute;s &agrave; l&rsquo;&eacute;cole, elle descend la rue Bonaparte jusqu&rsquo;&agrave; la biblioth&egrave;que Mazarine, quai de Conti, face &agrave; la Seine, o&ugrave; elle passe le reste de la journ&eacute;e &agrave; &eacute;crire des histoires au milieu des incunables et autres volumes rares reli&eacute;s en vieux cuir. &ldquo;Pour quinze euros par an, j&rsquo;ai le plus beau bureau de Paris, dit-elle. L&rsquo;autre jour, j&rsquo;ai refait ma carte et je me suis rendu compte que je me suis inscrite pour la premi&egrave;re fois en 1999. J&rsquo;avais envie de me jeter par la fen&ecirc;tre!&rdquo; Ah je retrouve bien l&agrave; ma Parisienne! Celle qui sort sans maquillage mais refuse qu&rsquo;on la prenne en photo parce qu&rsquo;elle est &ldquo;horrible aujourd&rsquo;hui&rdquo;; celle qui r&ecirc;ve de partir loin de Paris mais qu&rsquo;on retrouve tous les soirs au th&eacute;&acirc;tre ou dans les d&icirc;ners en ville; celle qui est en couple mais ne voit son homme que les week-ends. Parisienne est compliqu&eacute;e. Mais c&rsquo;est pour &ccedil;a qu&rsquo;on l&rsquo;aime.

1. Th&eacute;&acirc;tre du Rond-Point 
&ldquo;C&rsquo;est l&rsquo;endroit le plus vivant de Paris, avec des spectacles quasiment jour&nbsp;et nuit, une librairie, un restaurant.&rdquo; 2bis, avenue Franklin-Roosevelt,

Paris 8e. Theatredurondpoint.fr

&nbsp;

2. Librairie de Nobele 
&ldquo;Cette librairie vend des livres d&rsquo;art, des livres rares et incroyables.Une survivante dans le quartier.&rdquo; 
 
35, rue Bonaparte, Paris 6e. Denobele.fr

3. Boutique Chanel 
&ldquo;Quitte &agrave; s&rsquo;offrir du parfum, pourquoi ne pas faire un tour par cette adresse historique o&ugrave; Mademoiselle avait son appartement...&rdquo; 
 
31, rue Cambon, Paris 8e. Chanel.com

&nbsp;

4. Roger la Grenouille 
&ldquo;C&rsquo;est l&agrave; que venaient Picasso et Balthus, &agrave; deux pas de leurs ateliers. Dans la salle du fond pr&egrave;s du piano, parfois on&nbsp;chante tr&egrave;s tard en sirotant un cognac Godet.&rdquo; 
 
28, rue des Grands-Augustins, Paris 6e. Roger-la-grenouille.com

&nbsp;

5. Boutique S&oelig;ur 
&ldquo;Des v&ecirc;tements simples, aux lignes androgynes. Cette jeune marque, cr&eacute;&eacute;e par deux s&oelig;urs il y a dix ans, est l&rsquo;une de mes pr&eacute;f&eacute;r&eacute;es.&rdquo;

88, rue Bonaparte, Paris 6e. Soeur.fr

Dans les rues de Paris avec Anne Berest

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